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Le parcours maritime du premier officier de pont Shailendra Mishra

Pour Shailendra Mishra, l'eau n'est pas seulement un lieu de travail, mais une passion de toute une vie, façonnée par les histoires de famille, les premiers souvenirs de la côte de Mumbai et l'excitation de guider un navire en haute mer. Aujourd'hui premier officier de pont naviguant au Québec pour Desgagnés, il évoque avec nous dans ces questions-réponses les contrastes entre les voyages internationaux et nationaux, l'importance de la camaraderie au sein de l'équipage et les conseils qu'il donnerait aux marins en herbe.
Q : Pouvez-vous nous parler un peu de vous ?

Le premier officier de pont Shailendra Mishra à bord du Laurentia Desgagnes
J'ai grandi à Mumbai, en Inde, une ville qui vit littéralement au bord de la mer. Parmi mes premiers souvenirs, je me souviens d'avoir visité le bord de mer avec ma mère, en regardant passer les bateaux et en imaginant la direction qu'ils prenaient.

Mon père, ingénieur maritime, a passé près de trois décennies dans le transport maritime commercial après un bref passage dans la marine. Ses récits sur le mauvais temps, les ports lointains et la vie à bord m'ont toujours fasciné et ont fini par éveiller ma propre curiosité pour le monde maritime.

Cela m'a amené à poursuivre une licence en sciences nautiques et, après avoir obtenu mon diplôme, j'ai commencé ma carrière sur des pétroliers et des chimiquiers.
J'ai aimé travailler sur les pétroliers car je les trouve polyvalents, fiables et toujours stimulants.

La navigation est comme un rêve devenu réalité, qui me ramène à ces jours d'enfance passés au bord de la mer.
Q : Votre père travaillait dans la salle des machines, mais vous avez choisi le pont. Qu'est-ce qui vous a attiré dans cette voie et comment cela a-t-il influencé votre expérience sur l'eau ?
Pour autant que je sache, tous les pères qui travaillent dans la salle des machines imaginent leur fils sur le pont et le voient un jour capitaine !

Ce qui m'a attiré sur le pont, c'est la responsabilité et le défi de la navigation. La possibilité de me tenir sur la passerelle, d'interpréter les eaux libres et de guider un navire en toute sécurité dans des conditions changeantes m'a donné un sens unique de l'objectif et de l'accomplissement. J'apprécie de prendre des décisions en temps réel qui influencent non seulement la trajectoire du navire, mais aussi la sécurité et le bien-être de toutes les personnes à bord.

Cette voie m'a permis d'être aux premières loges de la nature dynamique de la vie en mer. Qu'il s'agisse de superviser les opérations de chargement, de mener des exercices de sécurité ou de diriger une équipe dans des conditions météorologiques difficiles, ce rôle m'a inculqué un solide équilibre entre discipline et adaptabilité.
Q : À quoi ressemble votre quotidien en tant que premier officier de pont ? Pouvez-vous nous présenter quelques-unes des principales tâches et responsabilités que vous assumez à bord ?
En tant que premier officier de pont, il n'y a jamais deux jours identiques, et c'est ce que j'apprécie le plus dans cette fonction. Chaque jour apporte son lot de défis et de possibilités d'apprentissage, tout en travaillant en étroite coordination avec une équipe à laquelle on fait profondément confiance.

Mes matinées commencent généralement tôt par une visite du pont pour m'assurer que tout se passe bien et en toute sécurité. En tant que chef de bord, ma principale responsabilité porte sur les opérations de chargement, la sécurité, la stabilité et la gestion de l'équipage de pont et des machines. J'organise aussi régulièrement des exercices de sécurité et des réunions d'information avec l'équipage, afin de m'assurer que nous sommes toujours prêts à faire face aux situations d'urgence, même celles qui, nous l'espérons, ne se produiront jamais.

La coordination entre la passerelle, la salle des machines et l'équipage sur le pont est très importante pour que tout fonctionne comme une machine bien huilée.

Au-delà des opérations, je me considère comme un point d'appui pour l'équipage. Qu'il s'agisse d'aider un nouveau venu à s'adapter à la vie en mer ou d'être simplement là pour parler après une longue journée, je prends cette partie de mon rôle au sérieux. Être premier officier de pont, c'est assurément une question de responsabilité, mais c'est aussi une question de leadership, de communication et de cœur. Je suis fier de porter ces valeurs chaque jour où je suis à bord.
Q : Vous avez travaillé à l'international et vous naviguez maintenant plus près de chez vous, au Québec. Quels sont les changements les plus importants que vous avez remarqués dans votre façon de travailler ou de vivre en tant que marin ?
La navigation internationale a été un chapitre incroyable de mon parcours. Chaque occasion de naviguer signifiait rencontrer de nouvelles personnes, travailler dans des environnements différents et s'adapter constamment. Mais le passage aux eaux intérieures, ici au Québec, a apporté un rythme entièrement différent à mon travail et à ma vie personnelle.

L'un des principaux changements que j'ai remarqués concerne l'équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée. Contrairement aux contrats internationaux qui pouvaient s'étendre sur des mois, nos cycles de navigation ici sont structurés, généralement un mois en mer suivi d'un mois à la maison. Cet équilibre a changé la donne. Cela vous permet de vous immerger pleinement dans le travail à bord, en sachant qu’un temps dédié à la famille et au repos vous attend à l’arrivée. Cela m'a aidé à me ressourcer et à être plus présent, à la fois en tant que marin et à la maison.

Une autre différence importante est la constance de travailler avec le même équipage et de naviguer dans les mêmes eaux. Dans mes premières fonctions internationales, chaque contrat s'accompagnait souvent d'un nouveau navire et d'une nouvelle équipe, ce qui impliquait de se recalibrer en permanence, d'apprendre comment les autres travaillent, de s'adapter à de nouvelles dynamiques et de naviguer dans des ports inconnus. Au fil du temps, on acquiert une connaissance approfondie des eaux locales : la façon dont les courants se comportent à certaines périodes de l'année, le fonctionnement des différents ports et même les petites nuances de l'accostage ou des manœuvres dans les passages étroits. Cette familiarité permet non seulement d'affiner ses compétences en matière de navigation, mais aussi de planifier et d'exécuter avec une plus grande efficacité. Elle élimine une grande partie de l'imprévisibilité du travail et permet une coordination plus fluide entre les différents services.

Contrairement à la navigation internationale, où les voyages sont plus longs et plus espacés, naviguer ici signifie opérer à une fréquence presque cinq fois plus élevée. Cette intensité crée également quelque chose de spécial. Vous naviguez régulièrement avec le même équipage et, au fil du temps, vous devenez une unité cohérente. Vous apprenez les points forts, les styles de communication et les habitudes de travail de chacun. Une confiance tacite s'installe au fil du temps, ce qui est particulièrement utile lorsque le temps change ou qu'un défi se présente. Le navire devient ainsi plus qu'un simple lieu de travail ; il devient un espace où l'on se sent ancré et soutenu.

Tout cela a changé ma façon d'aborder la vie en mer. Je suis plus attentif à ma façon de travailler, d'écouter et de soutenir les personnes qui m'entourent. Cela me rappelle que l'évolution d'un marin n'est pas seulement une question de compétences techniques, c'est aussi une question d'évolution en tant que personne.
Q : Quels conseils donneriez-vous à quelqu'un qui envisage de faire carrière dans la navigation maritime ? Y a-t-il quelque chose que vous avez appris et que vous auriez aimé savoir plus tôt dans votre carrière ?
Si vous envisagez une carrière dans la navigation maritime, il est important de comprendre qu'il ne s'agit pas d'un emploi classique de 9 à 5. La vie sur l'eau s'accompagne de longues périodes loin de chez soi, de décalages horaires et de conditions météorologiques imprévisibles. Elle est exigeante sur le plan physique et émotionnel. Si l'expérience peut être profondément enrichissante, elle exige un niveau de résilience et d'engagement auquel tout le monde n'est pas préparé.

L'une des leçons que j'ai apprises est que si les connaissances techniques sont essentielles, votre capacité à vivre et à travailler harmonieusement avec d'autres personnes dans des espaces restreints est tout aussi importante. L'intelligence émotionnelle, la communication et le travail d'équipe jouent un rôle essentiel dans le maintien d'un environnement sûr et positif à bord.

Autre conseil : ne jamais cesser d'apprendre. Le secteur maritime est en constante évolution, avec l'apparition régulière de nouvelles technologies, de nouvelles réglementations et de nouvelles normes environnementales. J'aurais aimé réaliser plus tôt à quel point l'apprentissage continu serait crucial, que ce soit par le biais de cours formels ou d'expériences pratiques en mer. Il est essentiel de rester curieux et capable de s'adapter pour réussir à long terme dans ce domaine.
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